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Le Blog de Babasse
19 décembre 2006

Du "a réalisé" au "à réaliser"

L'été 2002 j'ai finalement enregistré très vite les cinq chansons (Bonnie, Boule d'instants, Mon cerveau jaune et Petite Pomme auxquelles j'ai ajouté une plus vieille, Louis), que j'ai mixées en janvier 2003 et que j'ai envoyées à quelques labels avec des micro-retours positifs. Content du résultat mais et après ? Babasse était né mais qu'attendais-je qu'il advienne du fin fond de mon Ariège d'adoption ?

Ce même janvier 2003 j'entamais ma première révision du concours d'instit, que je ratai quatre mois plus tard. Juliette était enceinte de Zadig, et nous coulions des jours paisibles dans notre campagne. Ces beaux-jours là je me lançai dans une collection de chansons péchues et lègères, les pastiches "Amour Standard". Ce furent mes derniers enregistrements "innocents". J'avais une frénésie de production de projets conceptuels dont "Amour Standard" devait être le premier d'une longue lignée à venir. Je me levais d'un bond le matin et courait le coeur léger à mon ordinateur-studio. Produire pour avancer: je voulais augmenter sérieusement mon volume d'oeuvre, créer plus vite pour que cette oeuvre soit très vite autre chose qu'une petite poignée de chansons bien soignées. Mais c'est alors qu'une mauvaise phase s'est enclenchée. Je plaçais de facto la musique au centre de mes préoccupations et de mes actvités. J'en faisais mon métier symboliquement (alors qu'en parallèle venait se s'éloigner l'idée de devenir instituteur). J'en faisais mon métier alors que je n'avais jamais été aussi loin du fait qu'il le devienne concrètement (je veux dire socialement et financièrement).

Alors que je passais du temps à la biliothèque pour étudier la vie des oiseaux en vue du nouveau projet en gestation "Babasse et l'orchestre cui-cui" (un orchestre fait de samples de chants d'oiseaux qui chanterait leur folklore et leur quotidien), l'automne est arrivée et Zadig est né. Les mois suivants nous avons pouponné tout en cherchant du travail Juliette et moi. Il nous fallait rebondir (étant tous les deux sans emploi). On cherchait sur toute la France. Le premier qui trouvait un CDI avait gagné. On le suivait. C'est Juliette qui a trouvé. Sur Toulouse (un CDD de 9 mois pérénnisable). Moi j'avais juste obtenu un contrat de journaliste local à Guéret (Creuse), seulement le week-end.

Bref, moi qui voulais me relancer ce n'était pas encore pour cette fois. Je me suis retrouvé seul avec Zadig, dans un rôle que j'ai eu beaucoup de mal à endosser le temps de trouver une crêche. Quand il faisait la sieste je filais enregistrer de nouvelles chansons guitare-voix écorchées et tristes. Je me plaignais de ne pas avoir assez de temps. Progressivement s'était donc installé dans mon être l'idée que je ne pouvais délaisser cette mission-là: continuer mon oeuvre, ne jamais l'ajourner. "La survie est belle" a été terminée tant bien que mal fin 2004. Je voyais que si mon propos reflétait mon état d'esprit, cet album-là, après la gaieté du précédent, était dans les eaux troubles.

Je me suis bien rendu compte que quelque chose clochait et que ce n'était pas qu'artistique. Il me fallait retrouver un boulot quel qu'il soit. Ce fut "La Croissanterie" pendant 6 mois, puis retour au journalisme, 6 mois aussi à "La Dépêche du Midi". En parallèle j'essayais d'élaborer un répertoire pour jouer sur scène. Car si je voulais sortir de ma chambre, c'était par la scène que cela devait se faire. J'ai ainsi fait quelques scènes ouvertes. Et là nous voilà presqu'aujourd'hui.

En novembre 2005, après "La Dépêche", j'ai pris deux semaines pour faire vite fait un nouvel album, enregistré à la bouche et à la guitare (ma nouvelle démarche), quelque chose de plus gai: "Les Cinq Sens". Depuis Raoul est né, en mars 2006, et je n'ai pas retravaillé depuis, et je n'ai pas enregistré mon album annuel non plus.

Petit à petit je rogne sur le temps imparti à la musique, j'épure (fini les samples et les arrangements épiques et foisonnants), et l'ombre de la culpabilité plane sur l'étendue amputée de la création. Je ne peux plus créer, mais je voudrais créer quand même: plus le temps, plus l'argent, plus la présence.

Alors j'écris ce blog. Pour entretenir la flamme. Pour me donner l'illusion de la création.

Je devrais mettre l'art de côté. Pour un temps. Pour voir. Car il m'a cantonné depuis plusieurs années maintenant dans une impasse logique, un paradoxe usant. Je devrais le mettre de côté car je n'arrive pas à en faire une activité sociale qui me nourrit. C'est devenu un repaire de solitude, d'égoïsme et de culpabilité.

Peut-être que ce qui peut me nourrir finalement c'est la potentialité de l'oeuvre. Il faut que la satisfaction du "à réaliser", l'emporte sur celle du "a réalisé".

Un peu comme quand on esaie de s'arrêter de fumer. Se dire pour y parvenir qu'on refumera un jour.

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Commentaires
D
C'est vrai qu'il est bien ce billet...
Répondre
J
hhhhheeueueue...
Répondre

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